Sacrement des malades

Il y a une démarche ecclésiale, tout seul je suis dans le désarroi, débordé par cette situation. Je vais demander la prière de l'église, téléphoner, écrire...il se met en route une démarche ecclésiale pour sortir de la solitude. C'est cette démarche qui va permettre le miracle, pas forcément la guérison, mais essentiellement de la métamorphose, de la transformation, de la transfiguration de ce que l'on vit en Christ.

C'est le même principe que l'eucharistie. Le peuple apporte le pain et le vin, il apporte ses offrandes par le prêtre qui préside, il les présente à Dieu et il invoque l'Esprit Saint sur ce pain et ce vin pour qu'ils soient sanctifiés. Il y a un sacrifice qui n'est pas uniquement renoncement, avec un aspect de purification, de dépouillement, mais essentiellement une consécration. Sacrifier, c'est rendre sacré, sanctifier. Dans le sens fort, c'est quelque chose qui est consacré. Si je sacrifie du temps, consacre du temps, c'est à quelqu'un. Cela va créer une communion.

L'idée du sacrifice est liée au fait de l'église, Corps du Christ, peuple de gens eux mêmes ''sacrifiés''. C'est à dire consacré par le baptême et la sainte chrismation et dont l'œuvre essentielle est non seulement de se sacrifier continuellement, de ratifier quotidiennement cette consécration, d'avoir vraiment une vie sacerdotale, sainte (en tant que peuple de Dieu), mais également de sacrifier, de consacrer toute chose, tout le temps, de présenter constamment à Dieu des offrandes, des besoins du monde, et d'accomplir ce service au sein du monde. On offre tout et en particulier la souffrance, la maladie. La maladie et la souffrance sont ainsi sacrifiés, c''est à dire consacrés.

La souffrance et la maladie sont soumises à l'action de l'Esprit Saint et progressivement transformées Corps et Sang du Christ, transformées en souffrance du Christ, en mort et résurrection du Christ, en Pâque du Christ. Ils deviennent par la prière de l'église, la foi de mon prêtre, Corps et sang du Christ, souffrance obéissante du christ. Tout ceci est la conséquence de la nature sacerdotale des baptisés. Ainsi la maladie peut devenir sacrement, si elle est présentée à Dieu. Elle devient sanctification d'elle-même, quelque chose de consacré. Le souffrant est introduit dans le mystère de cette Pâque.

Sacrement des malades, oindre le malade d'huile consacrée le Mercredi Saint, cette onction se fait après lecture de l'évangile, dans le prolongement du Christ, pour manifester que c'est le Christ qui le fait. C'est l'église qui fait cela et non le prêtre. C'est l'église qui agit, sous la présidence du prêtre.

Il y a eu dans une paroisse une femme qui souffrait d’un cancer particulièrement douloureux, effroyablement douloureux. Cette maladie atroce, au-delà même des mots, est devenue un évènement pour l’Eglise et pas seulement pour cette femme, ou pour le couple. L’Eglise s’est mobilisée autour de cette souffrance, par la prière, la présence, des formes de compassion, d’entraide, toutes choses faites dans la prière, la foi, avec les sacrements des malades, communion, pénitence, jeûne, des gestes extrêmement humains comme prendre dans ses bras le mari effondré, toutes formes fraternelles ecclésiales.

C'est le ministère des fidèles, de l'église, des laïcs d'être présents près des malades, de prier pour eux, d'accompagner, fortifier et surtout d'invoquer incessamment l'Esprit saint sur le souffrant, pour que ce souffrant puisse vivre ce drame de la souffrance et de la maladie comme le vivaient les martyrs, c'est à dire dans la foi, pur de toute révolte, de tout doute, et dans une certaine transfiguration, acquisition de charismes, comme celui de la prière pour le monde. Ils s'opèrent ainsi un renversement, la souffrance devient un lieu de communion, du témoignage de foi.

Celui qui souffre, finalement encourage les autres, leur donne la compassion. Les autres qui étaient venus pour prier viennent en final pour recevoir. Il y a un rejaillissement de la grâce de l'Esprit Saint sur l'ensemble de l'église. L'ensemble de l'église qui est présent reçoit par l'intermédiaire de la personne souffrante et obéissante.

C’est le ministère des fidèles, de l’Eglise (prêtres et fidèles), des laïcs, d’être présents près des malades, de prier pour eux, d’assister, d’accompagner, d’invoquer incessamment l’Esprit Saint sur le souffrant, pour que ce souffrant puisse vraiment vivre ce drame de la souffrance et de la maladie comme vivaient les martyrs, c’est dans la foi, purs de tout blasphème, de toute révolte, de tout doute, et dans une certaine transfiguration, une certaine acquisition de charisme.

On a vu certains personnes qui au cours de leur maladie mortelle sont progressivement devenue soucieuse des autres, ont commencé à faire de leur maladie le lieu de prière pour le monde. Il s’opère ainsi un renversement, la souffrance devient le lieu de la communion, du témoignage de foi. Celui qui souffre finalement encourage les autres, les fortifie dans la foi. Leur donne de la compassion. Les autres qui étaient venu pour prier, viennent finalement pour recevoir.  Ayant reçu par ce témoignage, par la prière de cette personne malade qui souffre, pour lui-même un accroissement de grâce, de foi, de sanctification.  Il y a un échange. C’est vrai pour tous les sacrements.

Pour que vraiment cette grâce de l'Esprit Saint puisse venir, une chose est nécessaire: c'est que celui qui souffre puisse, à un moment ou un autre, accepter cette souffrance.  Je ne dis pas la subir, de l’accepter passivement. Accepter, veut dire ''oui''. Humainement, c’est impossible.

C’est beaucoup demandé à un être humain que de dire oui, surtout quand la douleur physique est intense. Parfois la morphine ne fait plus rien, on ne peut plus rien faire pour atténuer la douleur du malade. Ils sont alors condamnés pour un temps à subir une douleur qui empêche le sommeil.

La personne peut alors dire comme le Christ: « que ce calice s'éloigne de moi », c'est à dire: guéri-moi et, quand la guérison ne vient pas, la guérison physique en tout cas, elle peut dire: « que ta volonté soit faite », par la grâce du Saint Esprit: s'identifier au Christ, s'incorporer complètement à la Croix, à la Pâque du Christ, alors est ouverte la porte du Saint Esprit.

Cette personne recevra vraiment pour elle la glorification de l'Esprit saint, et aussi pour l'église, pour l'assemblée de ceux qui sont autour. Tu peux aussi, par la grâce du Saint Esprit, et uniquement par elle, obéir à cette situation imposée, miraculeusement se transforme en quelque chose de choisi.

Cette expérience d’acquisition du Saint Esprit auprès des personnes malades et souffrantes a lieu quand celles-ci disent comme le Christ : oui, là est la question de l’obéissance.

Tu peux très bien subir, être plein de révolte, plein de ressentiment. Tu peux aussi par la grâce de l’Esprit Saint et uniquement par elle, obéir à une situation imposée, quelque chose imposée se transforme en quelque chose de choisi.

Un de nos prêtres racontait qu’une personne atteinte de sida qui avait d’abord été dans une révolte, avec des pensées de suicide puis, par la grâce du Saint Esprit, avait accepté cette maladie. Alors il s’est transformé complètement de l’intérieur. A un moment donné, il a dit : « si on m’enlève cette maladie, je ne suis plus d’accord, ce que cette maladies m’apporte je ne veux pas en être privé ».

L'obéissance a une forme de croix devient telle, elle est tellement vraie, que la personne ne veut pas qu'on lui retire cette croix; ne me la retire pas car je suis en train de goûter les fruits de cela, j'ai commencé à goûter la joie de l'Esprit Saint qui me vient, je suis déjà au-delà de la souffrance, au-delà de la douleur, je suis déjà dans la joie qui vient.

Le sacrement de l'onction des malades est défini par les pères essentiellement comme le mystère de la ''descente de l'amour'. Ce sacrement est fait pour nous ouvrir la porte de la réalité de la souffrance obéissante et résurrectionnelle du Christ, mystère de la descente de l'amour. L'huile utilisée est le signe de la miséricorde divine qui est à l'œuvre, que le Royaume de Dieu est arrivé. C'et le signe de la présence du Royaume.

C'est surtout dans la maladie que l'on a besoin que l'on nous rappelle que l'on est ''roi'', Gardien de quelque chose, et prêtre: dans cette consécration non seulement de soi mais de tout ce qui nous est imparti, la joie et la peine. On est prêtre parce qu'on offre la souffrance dans l'épiclèse du Saint Esprit.

Pouvoir dans le cadre de cette souffrance connaître ce qu'est l'amour divin, ce qu'est l'amour que le Christ éprouve sur la Croix, qu'il éprouve pour son Père et pour tous les hommes, au sein d'une souffrance aussi inhumaine que la souffrance du Christ en Croix: physique et morale.

Le Christ est venu évangéliser la souffrance, cela transfigure. Le débile profond reste un débile profond, mais si quelqu'un vient et le bénit, le sanctifie, rend possible une ecclesialisation de sa situation, c'est immense.  Un débile profond, dans la pureté de son cœur est apte à recevoir la grâce du Saint Esprit et à être admis dans le Royaume des Cieux. Encore faut-il qu'on l'évangélise, qu'on s'approche de lui, qu'un bon samaritain mettre de l'huile sur ses plaies. C'est pourquoi cet évangile est par excellence l'évangile de l'onction des malades, de la sanctification de la souffrance physique et morale.

On invoque l'Esprit Saint sur le malade comme on l'invoque sur le pain et le vin, en ce sens le malade devient l'autel lui-même, devient cette victime du sacrifice non sanglant du Christ. Et on le fait au Nom du Seigneur, avec la puissance du Nom. Le Nom est présence.

Ce qui est anticipé dans ce sacrement est la résurrection finale. Cette maladie, cette mort n'est pas pour toujours. La Croix c'est le signe de la fin de la souffrance, de la mort, puisque la Croix est le signe de la résurrection.

Il y a l'annonce du relèvement, même si ce n'est pas pour maintenant, mais au dernier Jour et pour la vie éternelle. Ce n'est pas pour maintenant seulement que nous prions mais pour le monde futur aussi, monde futur qui est déjà là, vie éternelle qui est déjà là. L'Esprit Saint que nous invoquons sur le malade est l'Esprit Saint du Royaume, du monde à venir. C'est le Royaume.

Dans la souffrance acceptée, choisie, il y a une ouverture sur le monde futur, sur l'éternité, sur l'au-delà non seulement de la souffrance mais du monde. Il y a une communion avec ''le monde-qui vient'', avec ce Christ qui vient, avec l'Esprit qui vient. Il s'agit du relèvement eschatologique.

(Extrait des enseignements et cours théologiques du Père Marc Antoine Costa de Beauregard)

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